Les agents de la police de circulation routière. cc congo actuel.com |
Éviter à tout prix de se faire arrêter après violation du code de la route, puis être conduit au
bureau de la police de circulation routière c’est le quotidien des chauffeurs de taxi de kinshasa. Dans cette
situation c’est la loi du plus ‘’souple’’ qui est la meilleure.
« Il nous arrive de donner de
notre plein gré entre 500franc et 1000 franc au policier de circulation
routière. Ceci pour que ce derniers ne nous embêtent pas pendant que nous
travaillons »explique Shiko un chauffeur de taxi. Cette pratique
pourtant informelle est devenue monnaie courante. Une façon d’obtenir une protection de la part de leurs parrains
en uniforme bleu. « Ne pas donner
de l’argent régulièrement est une déclaration de guerre aux policiers »
renchérit Christophe un autre chauffeur
de taxi.
Corruption ou simple geste
de générosité ? « Avec cette
argent, ils peuvent acheter de l’eau fraiche ou un soda pour se désaltérer car
le soleil est parfois accablant » ironise en souriant Christophe.
Une
collaboration où chacun trouve son compte
« Il nous arrive d’avoir des problèmes de stationnement et dans ce cas
nous avons besoin de l’aide des agents de la police de circulation routière.
Car avec un tel problème, on peut payer jusqu’à 150 000 franc congolais
mais si c’est un roulage à qui on a déjà ‘’serrer la main’’ il sera indulgent
envers nous. On peu lui donner entre 10000 et 20000 franc ‘’d’amande’’. En plus
après lui avoir donné cet argent, on continu de circuler. On gagne en
temps et en argent.» explique
Shiko. Papiers en ordre ou pas, les chauffeurs sont obligés de serrer la main
d’un policier pour y glisser quelques billets de francs congolais, faute
de quoi ils s’exposent à des représailles et tracasseries de tous genres.
Mais
les chauffeurs sont de loin victime de l’opération ‘’taxe spéciale roulage’’.
Selon un agent de la police de circulation routière affecté à kitambo Magasin, la
plupart d’engins commis au transport en commun dans la ville de Kinshasa ne
sont pas en ordre, soit sur le plan des documents, soit sur le plan
technique. « C’est difficile d’arrêter un chauffeur qui est en
ordre. Celui qui est dans ses droits ne cédera sûrement pas aux demandes des
roulages. Les chauffeurs eux-mêmes ne se mettent pas en ordre avant de mettre
leurs véhicules en circulation. Alors, les roulages ayant un esprit faible
devant l’argent ne peuvent que profiter de la situation ».
Absence
de ceinture de sécurité, rétroviseurs absents, bidon rempli de carburant et
placé à côté des passagers tenant lieu de réservoir, fumée plus ou moins
abondante à l’intérieur ou à l’extérieur du taxi sont là les quelques
caractéristiques des bus et taxis à Kinshasa.
Les
agents de la police routière réagissent
Plusieurs
agents de la brigade routière refusent d’aborder le sujet pour, soi-disant, des
raisons personnelles. Par ailleurs, l’un d’eux sous couvert d’anonymat, réfute
maladroitement les accusations des chauffeurs : « Ce phénomène
n’existe pas, en tout cas pas à ma connaissance. Nous nous postons à notre lieu
de service pour vérifier les papiers et le permis de conduire ».
Les
autorités de Kinshasa résolues d’éradiquer ce mal
Face à cette situation quelques sanctions sont déjà tombées. Le 30 mars dernier, six policiers dont une femme ont été renvoyés définitivement de
la police nationale congolaise. On les accusait de « tracasserie et extorsion »
de biens de la population. L’un après l’autre, ils sont dépouillés de leur
tenue et insignes. Un acte louable mais malheureusement rare.
Le cout
de la corruption selon
docteur en sciences économiques à
l’Université de Kinshasa Batamba Balembu
Un exemple : l’activité de taxi
En effet, Batamba Balembu, dans une étude micro-économique, estime la perte résultant de
la corruption de l’ordre de 8%
des recettes journalières moyennes des conducteurs des
taxis et taxi-bus, dans la capitale, Kinshasa, qui sont « obligés »
de payer aux policiers de la route des sommes d’argent
injustifiées. Ce qui représente plus de 60%
du revenu moyen gagné par cette catégorie
socio-professionnelle. L’auteur explique aussi que la pratique corruptive est notamment à la
base d’un déséquilibre (embouteillage, contournement des itinéraires,
etc.) sur le marché des transports en
commun. Concrètement, 94%
des enquêtés de Batamba Balembu sont de cet avis.
47% des conducteurs recourent au contournement des itinéraires infestés par
les policiers racketeurs, 48% sectionnent
carrément les trajets ordinaires en sous-trajets afin de
ne pas réduire les profits (du fait du racket) et
5%majorent les tarifs des
transports. Conséquence : l’accès au service
public est compliqué.
Une perte pour l’État
Le même auteur poursuit, dans la même étude, sa quantification
du coût de la corruption en République démocratique du
Congo. Il pense que 55%
en moyenne des recettes du Trésor échappent à cause
de la fraude fiscale liée à la
corruption. L’auteur écrit : « Les manques à gagner que le Trésor public subit
annuellement s’évaluent à quelque 800 millions de dollars
US. Ce qui représente environ 12% de la
moyenne du PIB des dernières décennies.
Selon le rapport de 2017
sur l’indice de perception de la corruption dans le monde de l’organisation Transparency international, la
RDC occupe la 166ème place
sur les 183 pays évalués. Toujours selon ce rapport, le pays n’a pas
fait des progrès dans la lutte contre la corruption.
Par Feza Umande Alice
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